15 juillet 2015

Galaxie M33


Juste pour le fun, à force d'amasser des images de la galaxie du Triangle, je peux en sortir une version LRGB qui tient la route. Le T2 de Slooh permet d'atteindre tranquillement la magnitude 19 sur les luminances, et ça permet de bien mettre en évidence les supergéantes dans les bras spiraux de la galaxie.


La full pour zoomer est disponible ICI.

Quelques éléments typiques des galaxies spirales sont visibles sur l'image de cette galaxie. Sa proximité (~3 millions d'années-lumière) fait qu'on peut en distinguer pas mal de détails.


Bien que très étendue dans le ciel (2 fois le diamètre de la plein lune), cette galaxie se révèle assez ardue à observer. Le ciel doit vraiment être bien noir, exempt de pollution lumineuse et un instrument modeste mais bien ouvert est nécessaire. Grossir fort ne sert à rien sur cette galaxie.

Voici une carte pour la repérer dans le ciel d'automne, entre la constellation d'Andromède (et sa grande galaxie) et la constellation du Triangle. En ce moment, en été, c'est au petit matin qu'il faut la chercher.

Crédit : Andrew Welsh (lien)


14 juillet 2015

Et à la fin vint la publication

Depuis ce matin on peut trouver sur arXiv.org le contenu d'une publication pour laquelle j'ai eu la chance d'être co-auteur.
Pour un amateur passionné de Science, c'est une aventure incroyable que de pouvoir La vivre aux côtés des pros, de partager leur quotidien de chercheurs et leurs réussites finales.

Il n'est pas fréquent que les amateurs soient auteurs, au sens "c'est eux qui ont écrit le papier". Par contre, le co-autorat permet aux auteurs d'associer ceux qui ont permis, par une petite ou une grande action, la réalisation d'une étude. Et puisque des amateurs aident les professionnels dans leurs travaux de recherche, on les retrouve régulièrement parmi la liste des co-auteurs d'une étude.
C'est particulièrement visible en astronomie, beaucoup moins en physique des particules par exemple où les amateurs ne peuvent pas reproduire des collisions protons-protons dans leur cabane au fond du jardin.

La publication est déjà totalement écrite lorsque son brouillon nous est transmis. Oui, on peut le lire avant tout le monde. On peut alors, même en tant qu'amateur, faire des remarques sur le brouillon, faire changer des choses de ci de là.
Qu'un amateur puisse faire des remarques sur la production d'un professionnel peut paraître incongru. Quelques années d'études et quelques diplômes nous séparent. Pour autant ça se passe très bien du moment que les remarques sont constructives.
La première fois, on se dit "Oulà, mais qu'est-ce que je vais bien pouvoir commenter ?"
Mais plus on lit de publications différentes sur un même thème, plus on se fait une idée de ce à quoi ça doit ressembler. Comme le veut l'adage, "C'est en forgeant qu'on devient forgeron" :-)

Pas besoin d'être une bête en astrophysique pour commenter un brouillon sur les supernovae.
Voici quelques astuces pour les quiches en sciences qui se retrouveraient à devoir relire une publication :
  • Les liens http mis en exemple ou en bas de page pointent-ils correctement vers une page Internet ? 
  • Quand un paragraphe fait référence à un tableau ou une figure, est-ce la bonne référence ?
  • Y a t-il des fautes d'orthographe ? (il en reste toujours un peu)
  • Les légendes des graphiques correspondent-elles à ce qui est représenté ?
  • Les chiffres ont-ils des unités ?
  • Les résultats avec lesquels on se compare sont-ils accompagnés d'une référence vers une autre publication ?
Les auteurs sont humains, ils font aussi des "fautes" d'inattention.

Ensuite, en fonction du niveau que l'on a, on peut se risquer à des remarques sur le fond. Ce n'est pas interdit. Si l'auteur répond qu'on se trompe, on gagne un mini-cours d'astrophysique en retour :-)
L'amateur est gagnant dans tous les cas.

- Mais de quoi ça cause, au juste, ce papier ?
- Ça parle de supernova. Ben ça alors ! :-)

Et pas n'importe quelle supernova : le supernova la plus lumineuse jamais observée. Rien que çà !
Mais la bougresse ayant explosé extrêmement loin de chez nous (3.2 milliards d'années-lumière), elle a beau être la plus lumineuse de toutes, il fallait quand même un télescope pour l'observer. Vous trouverez par exemple ici une image de Joseph Brimacombe qui montre cette supernova, elle ne paye pas de mine.

L'annonce de sa découverte a été faite dans l'ATEL n°7642 le 16 Juin, mais des traces de sa présence ont été retrouvées jusqu'au 18 Mai, à la limite de détection des télescopes d'ASASSN. Elle se trouve dans une galaxie au nom totalement improbable : APMUKS(BJ) B215839.70-615403.9
Je pensais avoir parcouru l'ensemble des catalogues existants (et ils sont nombreux), celui-ci était une totale découverte pour moi.

Sa distance disais-je, de 3.2 milliards d'années-lumière, nous indique quand elle a explosé : il y a 3.2 milliards d'années-lumière. Pendant tout ce temps, sa lumière a simplement voyagé dans l'espace pour arriver jusqu'à nous.
Si tout le monde se souvient à peu près que les ères géologiques sur Terre s'appellent "Primaire", "Secondaire", "Tertiaire" et "Quaternaire", qui se souvient qu'il y avait quelque chose avant "Primaire" ? C'était le précambrien. Demandez-donc à vos grand-parents ;-)

A cette époque, rien de vivant sur Terre n'était visible à l'oeil nu. Il fallait attendre encore 1 bon milliard d'années pour que les premiers êtres vivants macroscopiques fassent leur apparition. (Lien)

La publication présente les circonstances de la découverte de cette supernova, son suivi photométrique et spectroscopique, et ce que les mesures nous apprennent de l'objet qui a explosé.

La nouvelle de cette découverte commence à faire un peu de bruit sur le web. Certains se sont essayés à publier des articles avant même que le papier ne soit rendu public, comme Sky & Telescope ou Nature qui précise cependant :
"The researchers would not discuss their preliminary findings withNature, because the results are being submitted to a peer-reviewed journal that wishes them not to comment"

Du coup, je ne pense pas pouvoir dire aujourd'hui dans quel journal "peer-reviewed" ce papier sera publié. Mais la version arXiv aura au moins le mérite d'être disponible pour tous ceux qui veulent quand même en parler.

Ah au fait, elle est ici la publication :-)

Une autre sur les supernovae doit suivre dans quelques jours aussi.
EDIT du 16/07/2015 : Elle est ICI.

9 juillet 2015

Pluton : J - 5

5 jours ! C'est le temps qui nous sépare maintenant du survol de Pluton par la sonde New Horizons.
La nuit dernière, je suis allé rendre une petite visite à cette petite boule glacée. Ce n'est qu'un point dans un télescope de 430mm de diamètre, mais les scientifiques n'y ont rien vu d'autre jusqu'à présent.
L'animation ci-dessous se déroule sur 2h30, avec un point au centre qui fait des va-et-vient : c'est Pluton. Il faut fixer une zone de l'image près du centre, et on voit distinctement apparaître un point qui bouge.
La Lune n'était pas dans le secteur cette nuit, je l'ai juste rajoutée pour donner une idée de l'échelle de cette image. Si elle avait été à cette place, je n'aurais vu aucune étoile autour d'elle, tellement sa lumière surpasse celle des étoiles environnantes.


L'animation en pleine résolution peut être visionnée ici : http://gifmaker.me/files/download/home/20150708/17/CntUVRIQ2S0ZQBzUIL2Gtk/output_gP6DXt.gif


L'occultation d'une étoile par Pluton la semaine dernière a confirmé que son atmosphère était toujours présente.
Avec en prime le pic de mi-occultation qui est généré par la réfraction de la lumière en arrière plan dans l'atmosphère de Pluton. Comme une espèce d'aura autour du disque de la planète pile au moment de l'alignement Etoile-Pluton-Terre



Les dernières images de la caméra LORRI de New Horizons donnent l'eau à la bouche, et les astronomes amateurs du monde entier s'en donnent à coeur-joie en traitant eux-mêmes les images brutes que la sonde envoie vers la Terre.

85 ans de mystères vont s'effacer dans quelques jours, et nous recevrons les images de ce survol pendant encore plusieurs mois.
Clyde Tombaugh a attendu ce moment sans jamais savoir à quoi ressemblait sa découverte, ni rien savoir des querelles qui agiteraient quelques années plus tard la question du statut de Pluton. Aujourd'hui une partie de ses cendres est à bord de New Horizons et survolera Pluton à plus de 50 000 km/h. Il sera aux premières loges.

Clyde Tombaugh (1906-1997) : découvreur de Pluton